DANS LA SPIRALE DE L'ENDETTEMENT VOS DROITS FACE AUX HUISSIERS

Section 3

Promouvoir l'Entraide


LA SPIRALE DE L'ENDETTEMENT

DANS LA SPIRALE DE L'ENDETTEMENT VOS DROITS FACE AUX HUISSIERS

LES NOUVELLES DISPOSITIONS SUR LES SAISIES

 

Le créancier ne peut procéder à aucune exécution forcée, c'est-à-dire une expropriation immédiate du débiteur, sans être nanti d'un titre exécutoire.

Les titres exécutoires comprennent les décisions de justice ; les actes notariés reçus en Belgique et délivrés en original ; les actes authentiques administratifs auxquels la loi donne force exécutoire, tel qu'un avertissement extrait de rôle…


La décision de justice

La décision de justice doit remplir un certain nombre de conditions de fond et de forme pour pouvoir donner lieu à une exécution forcée.

L'exécution forcée de la décision de justice est limitée à l'étendue de la condamnation prononcée. Il va de soi que le titre de justice doit contenir tous les éléments nécessaires à la détermination avec exactitude de la prestation ou du montant dû par le débiteur.

L'exécution d'un jugement ne peut avoir lieu qu'en vertu d'un titre qui a conservé, au moment de l'exécution, son efficacité exécutoire.

Certains titres peuvent être privés de leur efficacité dans le cas où, par exemple, la créance constatée dans le titre a été éteinte, par paiement, par remise de dettes, etc… ; a été modifiée par une nouvelle convention ou un avenant ou qu'elle n'est plus exigible par l'octroi de termes et délais.

La condamnation judiciaire n'est plus susceptible d'exécution forcée suite à la prescription de l'action judiciaire par l'écoulement d'un délai de 30 ans à dater du jugement.

Un jugement par défaut, fut-il réputé contradictoire, est périmé s'il n'a pas été signifié dans l'année (article 806 du Code judiciaire).

Tant que le jugement par défaut n'a pas été signifié, l'opposition reste ouverte, même après plusieurs années et quel que soit le montant du litige, sauf confirmation tacite ou expresse.

Toute décision de justice qui prononce une condamnation ne peut être exécutée qu'après avoir été signifiée à l'autre partie.

L'absence de signification, hormis le cas où le débiteur renonce à cette formalité (pour en éviter les frais), entraîne la nullité relative de l'exploit de saisie - article 1495 et 861 du Code judiciaire. Si une exécution doit être poursuivie, cette signification est obligatoire.

Toute décision doit être passée en force de chose jugée avant de devenir exécutoire, c'est - à - dire qu'elle doit devenir définitive par l'écoulement du délai de recours - opposition ou appel - sans réaction du débiteur, par l'acceptation du débiteur, sauf si elle est exécutoire par provision (= le jugement sera exécuté même si la partie condamnée a fait appel ou opposition).

Ainsi la condamnation au paiement d'une somme d'argent encore susceptible de recours ordinaire - opposition ou appel - ne peut être exécutée avant l'échéance d'un mois suivant la signification de la décision par les soins d'un huissier de justice, à moins que l'exécution provisoire ait été ordonnée.

L'exécution provisoire d'une décision, malgré l'appel ou l'opposition, se fait aux risques et périls de la partie poursuivante - article 1398 du Code Judiciaire - celle-ci pourra en effet être tenue à restitution et à réparation de l'entièreté du préjudice causé par ladite exécution provisoire en cas de réformation de cette décision.

Les contestations soulevées par l'exécution des décisions judiciaires relèvent de la compétence du juge des saisies. Celui-ci n'étant pas un juge d'appel, il ne peut ni réformer, ni modifier, ni étendre ou restreindre les droits consacrés par la décision judiciaire.


LES SAISIES

La saisie est une procédure d'exécution individuelle, parce que déclenchée à l'initiative d'un seul créancier, qui exerce les droits lui conférés par les articles 7 et 8 de la loi hypothécaire à savoir :

- Le droit de saisir lesbiens du débiteur, servant de garantie de ses créanciers, à l'exécution de ses obligations personnelles.

- Le droit d'affecter le patrimoine du débiteur au paiement de tous les créanciers, dans le respect de l'égalité, hormis les causes de préférence.

Le Code Judiciaire reconnaît  à tout créancier le droit de s'associer à une poursuite déjà pratiquée et de concourir à la distribution du prix de réalisation (vente) des biens saisis.


LA NOUVELLE LOI EN MATIERE DE SAISIE

Depuis la loi du 14 janvier 1993 (Moniteur Belge 20/02/1993, p.3894 et s.), la matière des saisies a été modifiée en développant quatre grandes orientations :

I. Amélioration de la publicité pour une meilleure information des créanciers saisissant et pour éviter la prolifération, parfois inutile, des actes de saisies.

II. Amélioration de la protection du débiteur pour des raisons économiques en modifiant l'assiette des biens saisissables.

III. Amélioration - pour des raisons humanitaires - de l'efficacité de la procédure d'exécution en instaurant la possibilité pour le saisi de procéder à la vente de gré à gré des biens saisis.

IV. Amélioration de l'information du débiteur pour porter devant le juge des saisies les contestations relatives à la procédure de l'exécution forcée.


I. PUBLICITE EN MATIERE DE SAISIE

En cas de saisie de biens meubles ou immeubles, l'huissier de justice qui l'a pratiqué adresse dans les 24 heures de l'acte, sous sa signature, au greffier du Tribunal de première instance du lieu de la saisie et le cas échéant, du domicile du saisi, un avis relatant l'identité et le domicile du saisissant, du débiteur saisi et, le cas échéant, du tiers saisi, la date de naissance du débiteur saisi, la date de la saisie, le lieu où elle a été pratiquée et, le cas échéant, la date de sa signification au débiteur saisi, la nature, le montant de la créance du saisissant, les causes éventuelles de préférence et la description des biens saisis - article 1390 du Code Judiciaire.

L'avis de saisie est conservé au greffe du tribunal et valable pendant 3 ans à compter de la saisie, sauf radiation à l'amiable ou par décision du juge. Il peut être renouvellé avant son échéance.

L'avis de saisie servira à mieux apprécier les chances de succès d'une exécution, alors qu'une saisie a déjà été pratiquée.


II. INSAISISSABILITE DES MEUBLES

La loi nouvelle - article 1408 § 1 - déclare insaisissable les biens suivants :

1. le coucher nécessaire du saisi (débiteur) et de sa famille, les vêtements et le linge indispensables à leur propre usage, ainsi que les meubles nécessaires pour les ranger, une machine à laver le linge et un fer à repasser, les appareils nécessaires au chauffage du logement familial, les tables et chaises permettant à la famille de prendre les repas en commun ainsi que la vaisselle et les ustensiles du ménage, un appareil pour la préparation des repas chauds, un appareil pour la conservation des aliments, un appareil d'éclairage par chambre habitée, les objets nécessaires aux membres handicapés de la famille, les objets affectés à l'usage des enfants à charge qui habitent sous le même toit, les animaux de compagnie, les objets et produits nécessaires aux soins corporels et à l'entretien des locaux, les outils nécessaires à l'entretien du jardin, le tout à l'exclusion des meubles et objets de luxe.

2. les livres et autres objets nécessaires à la poursuite des études ou à la formation professionnelle du saisi ou des enfants à charge qui habitent sous le même toit.

3. si ce n'est pour le paiement de leur prix, les biens indispensables à la profession du saisi, jusqu'à la valeur de cent mille francs (10 000 Frs dans le texte ancien) au moment de la saisie, et au choix du saisi.

4. les objets servant à l'exercice du culte.

5. les aliments et combustibles nécessaires au saisi et à sa famille pendant un mois.

Les objets visés ci-dessus restent saisissables s'ils se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi demeure ou travaille habituellement.

Il est important de préciser que la loi a insisté, à plusieurs reprises, sur le pluriel, en ce qui concerne les appareils de chauffage, les meubles nécessaires au rangement des vêtements, les tables et chaises pour prendre les repas en commun, les objets affectés à l'usage des enfants, les animaux de compagnie, les outils nécessaires à l'entretien du jardin, les livres et autres objets nécessaires à la poursuite des études ou à la formation professionnelle, les biens indispensables à la profession du saisi.

S'il est dorénavant interdit à l'huissier de saisir une machine à laver et un fer à repasser, rien ne l'empêche de saisir une deuxième machine à laver, l'appareil de séchage, la planche à repasser le linge et les autres fers à repasser du ménage. De même, il lui est interdit de saisir le réfrigérateur du saisi, mais pas le congélateur ou le second réfrigérateur. L'huissier ne peut plus saisir la cuisinière, mais peut par contre saisir le(s) four(s). 

Les vêtements nécessaires au saisi et à sa famille, ainsi que les meubles pour les ranger ne sont plus saisissables, sauf s'il s'agit de meubles de luxe, là est la controverse.

Le problème qui soulève actuellement beaucoup de difficultés est celui relatif aux objets affectés à l'usage des enfants à charge.

Une première précision s'impose, le législateur ayant parlé d'enfants à charge sans autre indication, les objets affectés à des enfants mineurs ou majeurs à charge qui habitent sous le même toit sont insaisissables.  Il sera aisé pour le débiteur saisi de prétendre que la télévision, la chaîne hi-fi, la vidéo, etc… sont affectés à l'usage des enfants.

Le législateur a précisé, lors des travaux préparatoires de la loi du 14 janvier 1993, que ces biens pouvaient échapper à la saisie à la condition que leur valeur soit proportionnelle aux revenus de la famille, à défaut de quoi, ils deviennent saisissables.

Quant aux animaux de compagnie, les textes de loi restant muets, l'huissier ne peut plus saisir les animaux de race de grande valeur ou les élevages effectués par des particuliers.

 

IV. PROCEDURE DEVANT LE JUGE DES SAISIES

Les difficultés soulevées par l'application de l'article 1408 du Code Judiciaire sur les biens insaisissables sont tranchées par le juge des saisies sur la base du procès-verbal de saisie actant les observations formulées par le saisi à l'huissier, à peine de déchéance, soit au moment de la saisie, soit dans les 5 jours de la signification du premier acte de saisie.

Sur le dépôt d'une copie du procès verbal de saisie, effectuée au greffe par l'huissier de justice ou de la partie la plus diligente, dans les 15 jours qui suivent la remise de la copie dudit procès verbal ou, s'il échet, de la signification de la saisie au débiteur, le juge des saisies fixe jour et heure pour l'examen et le règlement des difficultés, le créancier et le débiteur préalablement entendus ou appelés. le greffier convoque les parties et informe l'huissier de justice instrumentant.

La demande est suspensive de la poursuite mais les biens demeurent frappés de saisie jusqu'à ce qu'il ait été statué.

Le juge des saisies statue toutes affaires cessantes , tant en présence qu'en l'absence des parties ; son ordonnance n'est susceptible ni d'opposition, ni d'appel - article 1408 §3 du Code Judiciaire -.

Cet article impose, ainsi, à l'huissier instrumentant de faire acter dans le procès verbal de saisie les observations formulées par le saisi, s'il est présent lors de la saisie, soit dans les 5 jours de la signification du premier acte de saisie.

En cas de contestation sur la qualification à donner à tel ou tel bien et sur l'application de l'article 1408 en général, la copie du procès verbal de saisie est déposée au greffe de la chambre des saisies du tribunal du domicile où la saisie a eu lieu par l'huissier ou par le saisi dans les 15 jours, soit de la remise au saisi du procès verbal, soit de la signification de la saisie au débiteur.

Le juge des saisies fixe jour et heure pour l'examen de l'affaire, le créancier et le débiteur sont entendus dans leurs explications.

Cette procédure suspend la poursuite de la procédure, les biens restant bien évidemment saisis, jusqu'au prononcé de l'ordonnance du juge.


Action en revendication

Le tiers qui prétend avoir un droit (propriété, location, dépôt) sur tout ou une partie des biens saisis peut introduire une action devant le juge des saisies tendant à se faire restituer ces biens.

Il faut rappeler que l'huissier peut saisir tout bien en possession du débiteur, sur base notamment de l'article 2279 du Code civil qui prévoit que la possession d'un meuble vaut titre.

Le tiers prétend être le propriétaire, le locataire, le dépositaire… du bien saisi doit citer par huissier de justice le saisissant et le saisi. Le tiers et le saisi peuvent agir ensemble. Le saisi est irrecevable à agir seul pour faire valoir les droits d'un tiers.

L'action en revendication suspend la procédure de vente, dans l'attente du prononcé de la décision du juge.

Il est important de préciser dans la citation, à peine de nullité, les preuves de propriété…afin de permettre au saisissant et au juge d'apprécier les prétentions du tiers revendiquant.

Le tiers revendiquant doit prouver, pièces à l'appui, qu'il est propriétaire ou dépositaire etc… au moment de la saisie.

Le pouvoir du juge est très large quant à l'appréciation des pièces présentées. Ainsi n'ont pas été admis comme preuve  une attestation de propriété sans date certaine ; les clauses de contrats de mariage de séparations de biens ; des reçus non accompagnés de factures ; des factures établies par des parents au moment où la saisie avait déjà eu lieu, etc…

Par contre ont été admis des factures, bons de commandes émanant de commerçants sérieux, un acte de location-achat… Le juge peut ordonner une expertise si nécessaire.

Lorsque les époux sont communs en biens, s'il s'agit d'une dette propre à l'un des conjoints, elle ne peut être recouvrée à charge du patrimoine commun sauf s'il est établi qu'il s'est enrichi. L'huissier peut saisir les biens propres du conjoint débiteur.

L'époux séparé de biens ne peut échapper à la saisie que s'il établit le caractère propre de la dette de l'autre conjoint. Lorsque par contre les conjoints créent une confusion de patrimoine de telle manière que le créancier ne puisse plus opérer une distinction aisée, la saisie pourra porter sur tous les biens, le conjoint peut alors introduire une caution en revendication. Si le conjoint n'apporte pas la preuve de sa propriété, les biens sont considérés comme indivis et le créancier pourra saisir le tout, mais il ne pourra les vendre qu'après partage. Il en est de même pour les concubins qui ont créé une confusion de patrimoine qui empêche le créancier d'opérer une distinction.

 

CONCLUSION

Il est conseillé de se mettre en rapport avec le créancier par écrit bien avant l'entamé des procédures judiciaires, afin de lui demander le bénéfice de termes et délais.

Au cas où le créancier refuse de vous accorder un échelonnement  de votre dette et vous assigne en justice, vous pouvez demander au juge de vous accorder des termes et délais.

Les juges accordent des termes et délais, si vous, le débiteur, êtes malheureux et de bonne foi, malgré l'opposition du créancier à ces termes et délais.

Il est important de faire choix d'un avocat tant pour les demandes d'étalement de votre dette, un regroupement de crédit est à déconseiller (votre dette ne fait que s'alourdir d'intérêts), que pour les procédures devant les juges.

Le débiteur qui rencontre des problèmes financiers graves et se heurte à ses créanciers peut bénéficier de l'aide d'un avocat pro deo (s'il remplit les conditions) qui se chargera soit de transiger avec les créanciers, soit de défendre vos intérêts devant les juges.

Tout débiteur qu'il soit indigent ou non peut bénéficier de l'avis de deux avocats, et ceci gratuitement, en se présentant tous les jours de 9H30 à 11H au Palais de Justice, Bureau de Consultation et de Défense (en abrégé BCD), place Saint Lambert, 4000   LIEGE.

D'autres organisations sont reconnues, notamment par les sociétés de distribution d'énergie, pour représenter les débiteurs : les CPAS (Liège et Oupeye pour notre région), Infor Familles à Liège, SOS Surendettement à Ougrée. Ces institutions peuvent vous aider dans vos démarches et s'efforcent de négocier avec les créanciers et d'établir avec l'accord des créanciers un plan de remboursement. Il existe aussi un numéro vert d'information de la Région Wallonne : le 0800/11901.

Sachez que si vous vous adressez à un avocat pour intervenir auprès de vos créanciers, il vous en coûtera 1 000 à 1 500 Frs d'ouverture de dossier et environ 1 000 Frs par créancier contacté. L'avocat doit respecter un barème établit par l'Ordre des Avocats mais ce barème laisse une grande latitude. Ainsi pour vous assister et vous représenter au Tribunal, selon l'importance des dettes, le nombre de créanciers, le barème dont question prévoit des honoraires de 12 500 à 75 000 Frs. Si votre créancier "perd", il devra vous rembourser les frais d'huissier et de justice, mais les honoraires de l'avocat sont toujours supportés par son client. Aussi avant de vous décider pour tel ou tel avocat renseignez-vous sur le montant de ses honoraires éventuels.

H.H.