Les tueurs du Brabant Wallon :« Jean-Marie Tinck et la première vague d'attentats »
A une semaine des élections et pour causes de quelques activités délinquantes de ses anciens contacts dans l'entourage de Francis Dossogne et d'un faisceau de petits indices que les magistrats trouvent troublant, Jean-Marie Tinck, 68 ans, cadre bien dans l'actuel décor, et pour qui n'a pas une parfaite connaissance du dossier, offre un profil rêvé d'un des tueurs du Brabant Wallon.
Un costume taillé sur mesure fondé sur une impression d'ensemble et des révélations que l'homme aurai fait à une connaissance française, un mode opératoire qui rappel un peu Monsieur AR.
Un profil, peut-être, trop parfait. Est-il raisonnable d'imaginer qu'une personne qui a gardé le silence du 13 mars 1982 à nos jours commette la grave et fatale erreur de se laisser aller à faire des confidences ? Bien qu'en y réfléchissant, il a quelques précédents :
Tout d'abord, un important homme public, qui au court d'une émission de télévision clame haut et fort « les tueurs me sont bien connus ». En 1986, le même personnage tiendra à nouveau un discourt presque similaire.
Il y a ensuite les Borains, qui sous diverses pressions ont avoués, se sont ensuite rétractés, ont ré-avoués, pour finalement être blanchit. A des nombreuses reprises, Jean R. Et J-D se vanteront d'être les auteurs du casse du 30 septembre 1982 chez l'armurier Dekaise à Wavre.
Bruno – V – Pierre D. Et bien d'autres ont fait des confidences, parfois pour se venger, d'autres fois par jalousie mais faute d'élément indubitable, les enquêteurs n'ont jamais pu, hélas, remonter à un authentique tueur du Brabant Wallon.
Après les tests ADN, la prochaine étape pour Jean-Marie Tinck est sans doute le polygraphe. Cet appareil est mieux connu du grand public sous le nom de « détecteur de mensonge ». Dans le dossier TBW et affaires connexes, la cellule d'enquête du Brabant Wallon a fait appel à un polygraphe canadien qui s'est déplacé spécialement en Belgique. A l'époque, cela n'avait donné aucun résultat.
Pour la complète information du lecteur, cette méthode est critiquable d'un point de vue scientifique et ne peut être utilisée comme preuve véritable devant un tribunal.
« Pour rappel, dans d'autres dossiers, Maitre Uittendeale a fait acquitter plusieurs suspects dont le Sergent P. qui pourtant, pour le polygraphe, était coupable. »
Autre fait troublant : le 2 octobre 1983, deux hommes entre dans l'auberge des trois canards à Ohain. Ils menacent, de leurs armes, le personnel et exigent d'obtenir les clés de la golf rouge de la fille du patron. Celui-ci est emmené de force sur le parking de l'auberge et est exécuté d'une balle dans la tête. Il décédera peu après à l’hôpital. Les tueurs prennent la fuite dans la golf volée.
L'auberge était fréquentée par de nombreux hommes publics, « l'une des filles de la victimes à toujours affirmé avoir reconnu l'un des tueurs à sa voix et sa grande taille ». A l'époque, magistrats et enquêteurs lui firent cette extraordinaire réponse : « pour accuser il faut des preuves, en avez-vous ? ».
La golf, professionnellement repeinte sera utilisée lors des deux monstrueuses attaques suivantes. Les deux dernières de la première vague. Où a-t-elle été repeinte ? Et par quel carrossier ?
Le 7 octobre 1983, attaque du super marché Delhaize de Beersel. Venus à quatre, les auteurs tuent le directeur, Freddy Vermaclen. Dans l'ultra-violente attaque, plusieurs personnes sont blessées.
Le premier décembre 1983, à Anderlues, les tueurs s'introduisent en plein jour dans une bijouterie. Ils abattent immédiatement la bijoutière. Son mari, à l'arrière boutique, alerté par les coups de feu se saisit d'une arme pour se défendre. Il n'en aura pas le temps, il est froidement exécuté. La luxueuse bijouterie regorge de montres de valeur, de pierres précisieuses, de magnifiques bijoux en or. Mais cela n'intéressera pas les tueurs, ils s'emparent d'un listing clients et quelques autres objets sans aucune valeur et repartent tranquillement sans être inquiété.
Le mode opératoire est fort semblable à celui utilisé par le couple infernal « Beïjer - Bouhouche » et décrit dans le livre « Le dernier mensonge » dont Beïjer en est l'auteur. Mais cela n'intéresse personne.
La filière Boraine.
Jean-Claude E. n'aurai jamais du se disputer avec Josiane D. la femme de sa vie.
En mai 1983, une arme de poing (un ruger) est déposé à la gendarmerie par une femme, Josiane D. craint que son très jaloux mari, Jean-Claude E. en fasse usage contre elle. Le propriétaire du ruger, un ancien policier du nom de Michel C.
Pour des raisons toujours mystérieusement inconnues, cette arme sera soumise à des expertises balistiques. Les experts belges rendront un verdict des plus surprenant : cette arme a été utilisée lors des attaques attribuées aux tueurs du Brabant Wallon. C'est le triomphe, Michel C. est inculpé, interrogé sur les lâches attaques. Il commence par nier, puis il déclare qu'il va tout dire : oui, il est l'un des tueurs, oui, il a bien participé à trois attaques. Michel C., donne même les noms de ses complices : Robert B., Kaci B., Adriano V., Michel B., et son lieutenant, Jean-Claude E. et bien d'autre encore.
La plupart de ces individus sont bien connus des services de police pour divers délits commis sans violence.
Oui, Michel C. pratique le tir de parcourt, passion qu'il garde de son ancienne profession de policier. Plus tard, certains diront même qu'il a suivit des cours de tir dispensé par Bouhouche.
Enquêteurs et magistrats sont aux anges : ils tiennent enfin les tueurs du Brabant. Mais très vite c'est le désenchantement. Michel C. et ses complices se rétractent. Puis à nouveau ils avouent. Puis se rétractent de nouveau. Les Borains, qu'on appelle ainsi parce que tous sont originaire du Borinage, vont ainsi balader les enquêteurs et magistrats pendant des mois.
Michel C. avouera 28 fois sa participation à la tuerie de Nivelle. Ce qui correspond à 28 version différentes, allant jusqu'à prétendre que deux des victimes étaient membre de la bande.
Les borains ont donné des détails troublants que seuls les auteurs pouvaient connaître. Et puis il y avait l'analyse balistique positive du ruger. Pendant un interrogatoire, Michel C. ira même jusqu'à prétendre que pendant la tuerie de Nivelle, une bande de fous sanguinaires a surgit, il ne sait d'où, et que c'est cette seconde bande qui a abattu Elise Dewit, Jacques Fourez, le gendarme Marcel Morue et son collègue. Les enquêteurs ont dû devenir fous à entendre toutes ces révélations contradictoires et pourtant, toutes plausibles.
En 1986, une nouvelle expertise du ruger est demandée à un service mondialement connu : les allemands de la BUNDESKRIMINALAMNT de Wiesbaden. Ils rendront leur verdict après quatre mois : le ruger de Michel C. n'est pas l'arme qui a été utilisée lors des attaques sanglantes des tueurs du Brabant Wallon.
Le seul élément matériel probant s'écroule. Pourtant, le magistrat, juge d'instruction, va dissimuler ce rapport pendant plusieurs mois, sans que l'on comprenne pourquoi.
« Cette faute incroyablement inadmissible, pour un juge d'instruction, lui vaudra d'être dé-saisis du dossier pour suspicion légitime.
Le dossier passe du parquet de Nivelle à celui de Charleroi. »
En 1987, les borains seront finalement traduis devant une cour d'assise. On leur reprochera uniquement leur participation à trois attaques.
Pour la défense, la partie fût aisée. Les analyses balistiques sont négatives. Quand aux aveux de leurs clients, ils auraient été extorqués sous la menace et la brutalité. Aveux d'ailleurs peu concluants, les zones d'ombres auraient été comblées par les enquêteurs.
En janvier 1988, il est, d'unanimité générale que les borains n'avaient ni les capacités intellectuelles, ni les moyens matériels pour commettre les actes qui leur sont reprochés.
Ils sont acquittés. L'enquête aura perdu plusieurs années et détruit plusieurs familles.
A suivre : Jean-Marie Tinck et la seconde vague de violence.
Léon ROUFOSSE